17 milliards d’euros de C.A. en 2015. 660 millions de produits diffusés chaque année. 55 000 salariés dans le monde. Le groupe adidas – dont adidas et Reebok sont les marques étendards – est un géant lié à l’Alsace depuis 1958. Le siège social d’adidas France est une porte d’entrée sur un monde presque utopique : tous les salariés sont heureux et fiers de travailler pour leur marque.

My adidas and me, close as can be. We make a mean team, my adidas and me. » Traduction : « Mes adidas et moi ne pourrions être plus proches. On forme une super équipe, mes adidas et moi. » Ce pourrait être un slogan, ce sont les paroles de My adidas, l’un des titres phares du troisième album de Run-DMC, sorti en 1986, et l’acte de fiançailles du hip-hop avec le sportswear. Si les Run-DMC ont eux-mêmes adopté l’uniforme tout-adidas sublimé par les fameuses Superstar, sans lacets, languette en goguette, pour dépasser l’image bad boy associée à la réputation hip-hop d’alors, ils ont, sans le savoir, lancé le culte des sneakers.

Mieux, ils sont devenus [après qu’un employé de la firme ait assisté à un concert où le public brandissait à l’unisson ses Superstar !] les premiers artistes à signer un contrat avec une marque, avec les retombées que l’on connaît. Aujourd’hui mise en avant par Kanye West, Snoop Dogg ou Pharrell Williams – en témoigne l’Instagram de notre nerd favori, mention spéciale aux Stan Smith toutes de bijoux revêtues – la marque à trois bandes exerce une fascination sans pareille auprès du consommateur, par le biais de la mode ou du sport. Dans ce contexte, la construction d’un mythe culturel, partagé et diffusé par les salariés eux-mêmes, est inévitable. Tous les collaborateurs croisés lors de cette journée de reportage pourraient d’ailleurs s’approprier les paroles scandées par ce cher DMC.

À Landersheim et parmi ses 200 salariés, impossible de ne pas le remarquer : la culture d’entreprise est partout, dynamisée par le lien indéfectible de la marque avec le sport. Valeurs communes, codes vestimentaires, méthodes de travail, faits marquants, tout y est. Alice Mosbach, programmateur en informatique chez adidas depuis 1983, se souvient : « Quand je suis arrivée, l’ambiance était assez stricte. Tout était hiérarchisé. Le vendredi était la journée sans cravate, mais sans, les managers n’étaient pas à l’aise. En 97, Yves Marchand est arrivé à la direction d’adidas France [un poste aujourd’hui occupé par Guillaume de Monplanet, ndlr]. Il venait travailler en complet adidas, nous a incités à faire du sport, nous a poussés à nous fréquenter entre services. Un an plus tard, adidas est devenu l’équipementier officiel de la Coupe du Monde : des télévisions ont été installées à tous les étages, on pouvait regarder les matchs durant nos heures de travail. La France a gagné la Coupe du Monde, ça a changé beaucoup de choses. »

« Tout est toujours possible »

Depuis, Alice Mosbach s’est mise au sport et pratique le running ou le fitness tous les jours entre midi et deux, comme beaucoup de collaborateurs. Grâce au comité de direction qui préconise aux employés de ne pas organiser de réunion à l’heure du déjeuner – et de ne pas envoyer de mails le vendredi pour éviter le stress avant le week-end ! – et à la présence de deux salles de sport jouxtant la cantine, rien de plus simple : 30 sports peuvent être pratiqués sur place. Ainsi, dès 12h15, la valse des sacs de sport débute. Des équipes internes de football et de basketball partent même profiter des équipements loués à la municipalité. Le slogan « Sport has the power to change lives » énoncé dans la politique RSE (Responsabilité sociétale des entreprises) est vécu par tous.

Un an après le succès vivifiant de la Coupe du Monde, le COMVIE, comité sous la responsabilité du service des ressources humaines formé par une vingtaine de salariés, fait son apparition chez adidas. Cette instance ultra-démocratique a pour but de faciliter la convivialité et le bien-être et dispose de son propre budget pour animer la vie de l’entreprise. Frédérique Laas, cs project et training manager, l’a intégré il y a 10 ans : « On essaye de répondre à la question “comment accompagner le collaborateur autrement ?” à chaque instant. Ici tout est toujours possible, il suffit de partager ses idées. » Un espace zen où faire la sieste et profiter de fauteuils massants est ouvert puis, le COMVIE contacte deux praticiennes qui proposent massages et détente trois jours par mois. « Le fichier est complet tout le temps. En deux minutes, c’est la guerre », confie Frédérique Laas, le sourire aux lèvres. C’est elle qui a proposé le concept de L’arrondi en caisse aux ressources humaines, opération qui consiste à proposer aux clients des magasins adidas d’arrondir leur facture pour soutenir les associations partenaires de la marque. Le bien-être se vit aussi par le partage. Application au quotidien ? La conciergerie, mise en place en 2012. Gérée par l’entreprise EasyLife et ouverte deux fois par semaine, elle permet aux salariés de bénéficier de nombreux services : pressing, cordonnerie, panier du marché, démarches administratives ou contrôles techniques, commande de capsules de café, sélection de prestataires pour le ménage à domicile, etc. C’est normalement à ce stade que le lecteur (ou la journaliste) commence à ressentir envie et/ou jalousie. Et ce n’est pas fini…

Autour du sport

Faciliter la vie des employés est un choix gagnant : énergisé par le sport et détendu, le salarié est forcément plus performant. Après enquête en interne, 91% des salariés interrogés déclarent être fiers de déclarer à d’autres qu’ils travaillent chez adidas et 85% d’entre eux, qu’il fait vraiment bon travailler dans leur entreprise. Hélène Wendling, senior manager human resources, explique : « La qualité de vie au travail est un engagement majeur de notre politique RSE. Dans ce sens, les salariés sont responsabilisés : à eux d’organiser leur temps de travail comme ils le veulent pour trouver leur propre équilibre, ils peuvent aussi travailler de chez eux. On leur donne cette flexibilité. Grâce à cette confiance, on sait qu’à un moment, ils vont faire ce qu’il faut. » En plus de cette relation vertueuse, tout un pan de la politique d’entreprise est centrée sur le développement personnel et notamment les formations, dont la liste est régulièrement mise à jour sur l’Intranet. Un salarié du groupe adidas (marques adidas et Reebok) pourra toujours changer de métier au sein même de l’entreprise et se créer son propre plan de formations. Pierre angulaire, la Peak & Sales Academy, bien ancrée dans l’ADN de l’entreprise : si des outils théoriques et techniques sont offerts aux commerciaux, une grande partie est consacrée à la préparation physique. Objectif : former des salariés de haut niveau. La métaphore sportive est loin d’être anodine. « Cette boîte transpire le sport, affirme Laurent Fricker, senior sales manager. adidas est un microcosme sportif très dense, c’est naturel que tout cela se retrouve dans les valeurs qu’on transmet. La terminologie et les méthodes de management sont, de fait, assez proches de cet univers. » Les valeurs d’un management compétitif ? « Marquer l’histoire de son sport, l’engagement collectif et individuel, le refus catégorique de l’échec et la remise en question permanente. » L’individu porte le groupe et le groupe, l’individu. Comme dans le sport, l’humilité et le respect priment. Laurent Fricker, lui, a choisi d’appuyer sa méthode sur deux points majeurs : la proximité et l’exemplarité qu’il s’applique à titre personnel. Tous les ans, il prend une à deux heures avec chaque membre de son équipe pour « savoir d’où ils viennent et où ils veulent aller. L’idée est de construire sur 3 ou 4 ans et de tracer des perspectives de développement, ensemble. » L’échange est constant et même encouragé par un tout nouveau baromètre mensuel mesurant les niveaux et les sources d’énergie. Les espaces de travail eux-mêmes incitent à la rencontre. À chaque étage de cet open space géant se cachent des petites salles où s’isoler pour travailler ou passer des coups de fil, les salariés jouissent d’une cafétéria et d’un espace convivial où ils peuvent organiser des réunions, moins formelles, et bien sûr feuilleter L’Équipe, la bible de ces lieux. Ces espaces surdimensionnés, les salariés seront amenés à les quitter en 2017, pour rejoindre le quartier du Wacken et un bâtiment de 5 000m2 (11 000m2 actuellement) qui regroupera les showrooms et tous les services (équipes dirigeantes, commerciales, marketing et back-offi ce). Nul doute qu’adidas conservera – voire dépassera –sa 9e place glanée au classement 2016 des entreprises où il fait bon travailler (Great place to work), la meilleure progression (+8 places) du tableau en une année. Qui postule ?

Tous solidaires

Déclinaison de la politique RSE d’adidas, l’engagement solidaire se vit au coeur de l’entreprise : les salariés eux-mêmes peuvent décider de prendre sur leur temps de travail pour accompagner Unis vers le sport ou Siel Bleu, trois associations partenaires du groupe. Hélène Chaudron, assortment ranging manager, est l’un des relais en interne pour Unis vers le sport, association engagée pour la réinsertion des jeunes de quartier à Strasbourg, l’apprentissage scolaire et de la vie à travers le sport.
« Ma mission, c’est de créer des passerelles entre les collaborateurs et l’association : les valeurs de l’entreprise, on les vit aussi au travers de cette solidarité », explique Hélène Chaudron. Ainsi, les collaborateurs peuvent consacrer une demi-journée par mois au soutien scolaire, aux rencontres sportives et à des journées thématiques. « Tous les ans, depuis trois ans, nous participons ensemble à la journée des enfants organisée par le tournoi de Roland-Garros. Deux à quatre fois par an, nous avons la visite des enfants de l’association qui viennent voir comment nous travaillons. »
En marge, Unis vers le sport promeut l’accès à l’éducation et à la pratique sportive dans les pays en voie de développement en organisant des voyages solidaires (Sénégal, Sri Lanka). Dans ce cadre, adidas et Unis vers le sport soutiennent l’association Terr’ativa au Brésil (Solida’Rio 2016) pour la construction d’un terrain multisports au cœur d’une favela et la rénovation d’écoles. Une grande collecte sera réalisée auprès des employés pour envoyer des fournitures scolaires aux bénéficiaires de l’ONG. adidas matérialise par ailleurs son soutien par des dotations matérielles et financières. L’arrondi en caisse mis en place par le COMVIE, autre opération de soutien financier, a permis la récupération de 100 000 dons (73 000 € ont été récoltés en 5 mois), dispatchés entre les différentes associations partenaires.

Patrick Tran – 33 ans chez adidas depuis août 2015

Il y a encore un an, Patrick Tran travaillait dans la finance pour l’industrie automobile à Paris. Originaire de la région de Mulhouse, il est tombé sur une offre d’emplois publiée par adidas et est devenu trade terms supervisor à Landersheim. Première surprise ? L’esprit d’ouverture. « Dans la finance, il faut être très rigoureux, ça transparaît parfois dans les relations. Mais ici, les échanges avec le manager sont plus libres. Tout le monde a la même motivation, tout le monde avance dans un but commun et ça, je peux dire que c’était quelque chose de nouveau. Ici, je n’ai pas l’impression de travailler, mais de coopérer. » Deuxième choc ? La relation d’adidas fusionnelle au sport. Sportif, il a rapidement pu s’intégrer par ce biais : « Travailler ici a décuplé ma pratique. Je fais du sport quasiment tous les jours : running 2 à 4 fois par semaine, et basket 1 fois par semaine ou tous les 15 jours. J’ai développé une énergie nouvelle. L’avantage, c’est que je n’ai pas l’impression de courir après le temps : je n’ai pas à faire de sport le week-end et peux donc m’occuper de ma famille. » La culture d’entreprise, il la ressent au premier jour, comme si c’était une évidence. Partagé par tous, l’engouement semble se transmettre aussi naturellement que la bonne ambiance et partagé avec les consommateurs de leurs produits, comme si, autour d’une marque, se rassemblait une communauté. « Autour d’adidas, il y a le sport, les grands événements, mais il y a aussi la musique, on le voit avec Pharrell Williams notamment, explique-t-il. Nos produits touchent de plus en plus de personnes, tout ça est très excitant. Ce n’est pas comme si on vendait des pâtes ! » Grand fan de sneakers, Patrick Tran est ici comme un poisson dans l’eau, il avoue vivre sa passion des baskets comme une pathologie. A-t-il des Nike dans son dressing ? « Je n’achète pas d’autres marques, et même si c’était le cas, je ne le dirais pas ! », répond-il avec humour. adidas, des pieds, à la tête.

Par Cécile Becker, Journaliste
Photos : Christophe Urbain


 Cet article est extrait du magazine hors-série ADIRA-ZUT ! 2016 dédié à l’attractivité économique de l’Alsace.

 

 

 


 

 

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